











1695 - LOUIS XIV - LETTRE DE GRÂCE ROYALE
Lettre manuscrite sur vélin Grand in-folio (70,5 x 45 cm) émise à Versailles par le roi Louis XIV, en avril 1695, accordant la grâce à Etienne Doise à la suite d'un homicide.
Contenu :
Ce document est une lettre de rémission accordée par le roi à un soldat nommé Étienne Doise, dragon dans la compagnie du sieur Garot, au sein du régiment Dauphin dragons, alors en garnison à Passavant-en-Argonne. Le 1er janvier 1695, Doise se trouvait dans un cabaret à Triaucourt avec son camarade La Rosine, lorsqu'ils furent violemment pris à partie par un certain Jolycœur, accompagné de plusieurs dragons de la compagnie du sieur de La Fosse. Une rixe éclata, les armes furent tirées. Tandis que La Rosine était blessé, Étienne Doise, poursuivi et menacé, fit usage de son pistolet et atteignit Jolycœur à l'épaule. Ce dernier succomba à ses blessures quelques jours plus tard. En raison des circonstances de légitime défense, du profond repentir du suppliant et de la nature non préméditée de l'acte, la grâce royale fut accordée.
Contexte historique :
En pleine guerre de la Ligue d'Augsbourg (1688-1697), le royaume est quadrillé de troupes en quartiers d'hiver et de garnison, sources fréquentes de rixes entre soldats — surtout dans les cabarets — sur les zones de frontière comme l'Argonne. Sous Louis XIV, la justice est fortement centralisée : la lettre de rémission (ou de grâce) relève de la Chancellerie, raconte les faits à la manière d'un "récit justificatif" (légitime défense, absence de préméditation, repentir), et éteint ou atténue les poursuites après enregistrement par la cour souveraine compétente. Le recours à la grâce royale, courant pour les homicides commis "en chaleur", joue un rôle d'apaisement social tout en rappelant le roi comme source de justice et de miséricorde.
Intérêt :
Ce document illustre un cas concret d'exercice du droit de grâce sous Louis XIV, dans un contexte militaire. Il met en lumière la régularité de telles procédures de pardon pour des soldats engagés dans des faits divers violents. Par ailleurs, on notera l'intéressante mention du régiment du Dauphin dragons créé en 1673 et renommé "7e régiment de dragons" à la Révolution. Ce régiment fut actif, notamment pendant la défense de Namur, sur la Meuse en 1695.
Signatures :
* "Louis" : signature royale (de cour), apposée par un secrétaire du roi
* "Colbert" : contresignature au dos, apposée par un secrétaire (probablement pour Charles Colbert de Croissy ou son fils Jean-Baptiste Colbert de Torcy)
Mentions manuscrites au dos :
- "lettre de rémission pour Etienne Doise, dragon, mai 1695, signée Louis, contresignée Colbert"
- "MM. Boucherat pour lettre de rémission à Etienne Doise"
- "De par le Roy" & contresignature de Colbert
Bon état général. Plis d'archives. Trace de mouillure ancienne et plis en partie droite sans gravité. Belle écriture lisible. Signatures bien formées.